Haïti : nouvelles du 25 décembre 2003

Le président de l'Afrique du Sud, Thabo Mbeki, doit participer aux festivités du bicentenaire en Haïti. Il y a quelques jours de cela, il a envoyé un bateau en direction d'Haiti avec deux cents hommes chargés d'assurer sa sécurité lors de sa venue. Selon certains médias sud-africains, ce bateau contiendrait un grand nombre d'armes de guerres, de munitions ainsi que deux hélicoptères militaires, bien plus que ce dont a besoin Mbecki pour sa sécurité...

La communauté internationale se doit d'arraisonner ce bateau avant son arrivée en Haïti, sous crainte d'un envenimement de la situation et d'un véritable massacre. La communauté internationale refuse de lever le petit doigt pour le moment. Pas assez de morts pour émouvoir l'opinion publique... Elle va donc attendre le bain de sang pour agir. La seule chose qu'elle a à faire est d'exiger le départ du pouvoir de Jean Bertrand Aristide.

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L'EXPRESS - « Vers le chaos »

25 décembre 2003

Deux cents ans, et tout ce sang... Le 1er janvier 2004, Haïti n'aura guère le coeur à fêter le bicentenaire du premier Etat noir indépendant, né au lendemain de la déroute d'un corps expéditionnaire venu, sur ordre de Napoléon, rétablir l'esclavage dans cette colonie indocile de la Caraïbe.

Défié par les élites et les campus, le président Jean-Bertrand Aristide s'échine à étouffer la rébellion, quitte à lâcher des cohortes de " chimères ", nervis recrutés dans les bidonvilles de Port-au-Prince. En trois mois, on a dénombré au moins une trentaine d'assassinats politiques. De Cap-Haïtien (nord) à Jacmel (sud-est), la province gronde elle aussi. A Gonaïves, la " cité de l'indépendance ", la liquidation en septembre d'Amiot Métayer, chef d'un gang jusqu'alors acquis au régime, a plongé le quartier de Raboteau dans l'insurrection.

D'autres défections minent le pouvoir. Deux ministres, outrés par la brutalité de la répression, ont démissionné. L'ambassadeur à Saint-Domingue a fait de même. Tandis que deux sénateurs, dont l'influent Dany Toussaint, quittaient avec fracas le mouvement Lavalas, socle de la nébuleuse aristidienne. Celle-ci parvient encore à mobiliser les gueux et les désoeuvrés, sourds aux appels du " groupe des 184 ", mosaïque émanant de la société civile, où le patron prospère côtoie le syndicaliste paysan ou la militante féministe.

Mais il ne suffit plus, pour le prêtre défroqué, de miser sur les traditions fractionnistes de l'opposition. Seule une fuite en avant violente peut sauver un mandat censé courir jusqu'en 2006. L'ancien curé salésien n'a pas renié que ses voeux. Il a aussi bafoué les promesses semées jadis au gré d'homélies incandescentes. Si le " messie des pauvres " vacille sur son piédestal, la misère, elle, se porte à merveille. Tout comme la corruption, le chômage, le sida et le trafic de cocaïne. L'élu populiste a vidé de leur sens les valeurs dont il truffe ses harangues. Justice, dignité, démocratie, fraternité, tolérance : tout ici sonne creux.

L'espérance de vie du Haïtien atteint à peine 50 ans. Celle du régime se compte en mois. Aristide symbolisait l'espoir d'un peuple asservi.. Il incarne la dérive despotique d'une clique guettée par l'autisme. Lui ou le chaos, menace le dernier carré des fidèles. Lui et le chaos, rétorque la rue.

Vincent Hugeux